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 Metallica - Master of puppets 
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Skeleton In The Forum
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Message Metallica - Master of puppets
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Metallica - Master of puppets (1986)

Je me souviens précisément de ma "rencontre" avec Metallica. Quelques mois plutôt je m'étais jeté sur le hard rock comme un chien affamé, ingurgitant tout ce qu'il trouve, jetant des regards inquiets autour de lui de peur qu'on ne vienne lui arracher la pitance de sa gamelle. La foudre avait frappée et j'en resterai marqué à vie. D'ailleurs, malgré mes ricanements, je comprends les jeunes affamés d'aujourd'hui, téléchargeant à qui mieux mieux pour "rattraper le temps perdu". Malheureusement le téléchargement a un revers de la médaille, mais c'est un autre sujet.

Metallica donc… Tout a commencé avec "Phantom lord", enregistré sur une "radio libre" locale. La radio s'appelait "Fréquence verte" et deux gars, Rémi et heu… je ne me souviens plus, présentaient un émission de hard rock hebdomadaire intitulée "Cocktail rock". Le générique est resté longtemps un délicieux mystère. J'ai découvert, des années plus tard qu'il s'agissait de "Foreplay" de Boston, instrumental génial que je vous conseille, extrait du premier album éponyme de ce sympathique groupe.

Pendant ces soirées (les mardis je crois) j'écoutais le poste (un gros transistor à cassettes) deux doigts sur "Play" et "Rec", la main droite griffonnant les noms des groupes et les titres de chansons sur un bloc-notes.
Le problème avec cette méthode c'est que vous êtes certains de rater deux choses : le début de chaque chanson (pour peu que les types finissent leur phrase sur l'intro en plus…) et l'orthographe des groupes. Je ne vous raconte pas le jour où l'un des deux animateurs a annoncé un titre de Une gouine mal estime… (c'était l'excellent et terrifiant "Disciple of hell" extrait de Marching out). J'ai d'ailleurs cru un moment que Manowar c'était Manoir... Ahahaha...
Au fil des semaines je composais donc des cassettes sobrement intitulées "Cocktails rock", véritables best of du moment (Judas Priest, Sortilège, Wasp, Mama's Boys, ADX, Iron Maiden…) Voilà comment j'ai commencé. Venait ensuite "l'enquête" auprès des potes.
— T'as des albums de… hum… Une gouine mal estime ?
— Bien sûr…
Les K7 vierges s'échangeaient alors à la dérobée.
— Sur la face B tu pourras me mettre un truc de WASP ?
— On verra, ironisait le clouté... (salaud de bourgeois qui a une platine vinyle ou un double magnéto K7 !!!)
Et puis comme j'étais un putain de maniaque je précisais toujours :
— Ecris les titres sur un papier à part, je les recopierai moi-même sur la jaquette.
Un mec qui m'aurait copié les titres au feutre sur la jaquette de la cassette pouvait me gâcher ma journée. Enfoiré.

C'est donc lors d'une de ces innombrables et enthousiasmantes soirées "radio" que j'ai découvert Metallica. "Phantom Lord". Quelle claque dans la gueule.
C'était à la limite du "too much". Je veux dire… j'étais pas un mickey, j'écoutais AC/DC, Motörhead ou Accept, autant dire des groupes de durs à cuire qui sentent sous les bras. Mais là, heu… c'était le tabassage en règle. Sur Kill'em all le groupe avait (pour la seule fois de sa carrière en fait) le son qu'évoquait son nom. "Métallique" à mort. Plus tranchant qu'une lame de rasoir, aussi délicat qu'une tronçonneuse. Je me souviens avoir écouté et rembobiné "Phantom lord" des dizaines de fois, augmentant le volume à chaque passage (et provoquant la fermeture de toutes les portes communicantes dans le petit appartement familial), habité par cette sensation jubilatoire de défoulement total et adolescent.

L'écoute intégrale de l'album m'avait un peu déçu (et me déçoit encore en fait), les autres titres n'étant pas à la hauteur de "Phantom lord" (j'ai un peu retrouvé la sensation provoqué par ce titre et son intensité avec certaines chansons du Hatebreeder de Children of Bodom).

Metallica c'était donc "sans plus" pour moi jusqu'à ce qu'un samedi après-midi d'errance urbaine. Nous fréquentions régulièrement une salle de jeux vidéos ("La tortue" pour les deux autres perpignanais du forum) dans laquelle on croisait souvent des "hardos". Là, nous nous jaugions du regard, embrassant d'un seul coup d'œil la somme de notre bon (ou mauvais) goût, arboré à grands renforts de badges, patches, dossards et autres rangées de clous. J'arborai pour ma part un magnifique Live after death dans le dos, un Manowar sur le cœur, une rangée de clous (pyramidaux) sur les épaules, un bracelet clouté et un bon pesant de badges sur l'avant de ma fidèle veste en jean).
Entre deux rangées de jeux d'arcade (un Rastan Saga et un Bubble Bobble), un pote s'arrête pour saluer un type. Tignasse de cheveux frisés, mitaine cloutée (trop la classe !) et casque de walkman autour du cou, le gus sort une cassette : Master of puppets. Vision de cimetière apocalyptique. Le souvenir de la dernière émission de Cocktail Rock remonte en une demi seconde ("Le chanteur, James Hetfield a réalisé d'étonnants progrès et chante vraiment de mieux en mieux….") Pendant ce temps le hardos à la main gainé de cuir et de clou acquiesce, l'air connaisseur, nous assurant de la qualité de l'album.

Ce n'est que quelques semaines plus tard qu'un de mes fidèles compagnons de trainâge de baskets me file une BASF avec Ride the lightning (face A) et Master of puppets (face B).
J'arrive chez moi et glisse la cassette dans mon walkman (un truc rouge en plastique tout naze sans touche Rewind, obligeant à tourner la face pour rembobiner… les plus jeunes lecteurs doivent me prendre pour un mythomane et pourtant c'est vrai, et je n'étais pas le seul à posséder ce genre de trucs !)

"Fight fire with fire". Autant vous le dire, je voulais me tirer. Aller loin de cette furie, de cet abattage en règle, de ce pilonnage systématique sur lesquels Hetfield (ou était ce Hammet ? Je les confondais toujours ces deux là) aboyait, oubliant toute notion de chant, de note et de heu… Mélodie ? (oui j'étais déjà chiant à l'époque sur l'idée de mélodie). Je me souviens de cette chanson comme d'une épreuve, un mur du son infranchissable. Je ne pensais pas pouvoir supporter l'album dans son entier si ça commençait comme ça.

Heureusement la suite allait me permettre d'entrer dans le cercle, grâce à "Fade to black" bien entendu et "The call of Ktulu" ('tain ces mecs lisent Lovecraft comme Steve Harris et moi !!!)
J'ai écouté des tas de fois Ride the lightning, mais pas autant que Master of puppets.
Master of puppets est probablement moins novateur ou moins ceci ou moins cela que Ride the lightning. Mais Master a le son. Ce son incroyable, unique et iconoclaste. Pensez un groupe dont les guitares, au contraire de s'affiner, s'aiguiser, s'épaississent, assomment et arrachent plus qu'elles ne découpent… Faut dire que l'on pouvait difficilement faire plus "fil du rasoir" que sur Kill'em all. Du coup c'est maousse. A chaque coup de médiator (vers le bas) c'est une montagne qui s'écroule, du granit et parfois à "grande vitesse" (je mets des guillemets en passant à tous les groupes 220 km/h actuel). Même en son clair les six cordes restent épaisses, tissant une toile arachnéenne d'arpèges pour mieux enserrer une proie promise à la morsure de solos venimeux. Hammet tente d'être à la hauteur de la folie ambiante, poussant ses interventions au bord de la rupture (phrasé schizo en écho déglingué au "in madness you dwell" de Hetfield, tirés de cordes hystériques "vais-je mourir ?"). Mais Kirk n'oublie pas de relever le défi de la mélodie. Sur les rythmiques moissonneuses batteuses et les intervalles tendus à l'extrême de son patron, il se faufile et glisse son feeling unique. Phrasé bouillonnant, sweep et wah wah ("Battery")… La classe.

Le plus incroyable avec cet album, c'est le sentiment d'étouffement général. Le son évidemment, la compression extrême des guitares et de la batterie (la claire de Ulrich sonne comme la grosse caisse de certains groupes !). Même la voix est systématiquement doublée, à la respiration près, pour augmenter l'effet rouleau compresseur.

Hetfield, moins criard que sur les disques précédents nous cause de la guerre, de la manipulation, du lavage de cerveau. Et quand accalmie il y a, Lovecraft et ses créatures innommables sont de retour ("La chose qui ne devait pas être"), menant à camisole ("Bienvenue au sanatorium"). Master of puppets est un album d'angoisses, angoisse de la folie, de la guerre, de la religion opium ("Leper messiah") et chaque instrument contribue au cauchemar, asphyxiant l'auditeur, rouleau compresseur laminant l'esprit pour le laisser vidé, lobotomisé face à la triste réalité de ce monde, un cimetière, un ciel apocalyptique et les mains rouges sang du marionnettiste.

_________________
If we keep our pride / Though paradise is lost / We will pay the price / But we will not count the cost.
Inoxydable - Blog hard // punk // rock


15 Déc 2005 22:38
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